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Dominicaines, fondées à Aix, en 1290, par le roi de Naples, Charles
II dit le Boiteux, comte de Provence, furent. d'abord logées par
ce prince à la maison de campagne qu'il possédait à une
lieue environ de la ville, du côté du couchant, et qui porte aujourd'hui
le nom de la Durane. Mais cet établissement n'était que
provisoire, et deux ans plus tard, c'est-à-dire au mois de juillet 1292,
Charles II transféra ces religieuses auprès des murs de la ville,
dans l'enclos dit de Saint-Antoine qui appartenait alors aux moines de Saint-Victor-lez-Marseille
et qu'il avait acheté de Raymond Lordeti, leur abbé. Le roi, accompagné
de l'archevêque d'Aix, Rostang de Noves, alla prendre les religieuses
à la Durane en grande cérémonie, et vint, les installer
lui-même dans leur nouvelle habitation qui était située
à peu près dans le local où furent bâtis, au XVIIe
siècle, les couvents des Andrettes et des Bénédictines,
occupés actuellement, l'un, par le collége de la ville, l'autre,
par une filature de coton.
L'église de ce monastère des Dominicaines fut dédiée
à la bienheureuse vierge Marie de Nazareth, et de là vient que
le chemin public qui conduisait de la ville au couvent fut appelé le
chemin de Nazareth, nom qui fut depuis continué à la rue qu'on
traça sur le même emplacement, lorsque le quartier des Augustins
fut enclos dans la ville, au milieu du XVe siècle.
Le couvent de Nazareth fut l'objet constant de l'affection de Charles II. Il
voulut que cette fondation fut pour cent religieuses issues de familles nobles,
lesquelles vivraient sous la conduite des Dominicaines, et qui éliraient
elles-mêmes leur prieure. Il affecta, pour leur dotation, la terre de
Meyreuil, celle de la Durane, quelques bastides au Sambuc, les moulins
de Pertuis et d'autres biens dont il ne leur restait, lors de la révolution,
que la seigneurie de Meyreuil ; aussi le nombre de ces religieuses était-il
considérablement diminué, et depuis longtemps on n'y en admettait
plus aucune si elle n'apportait une dotation en argent, ce qui était
contraire à leur première institution.
Le 8 septembre 1297 le même roi Charles II, ayant fait venir de Rome et
des lieux saints, un nombre considérable de reliques qu'il avait déposées
au Palais, dans la chapelle de Saint-Mitre, les fit porter processionnellement
dans l'église de Notre-Dame de Nazareth, et assista en personne à
cette procession, accompagné des archevêques d'Aix et d'Otrante,
des évêques de Marseille, de Vence, de Digne et de Riez, et du
grand-maître de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, Guillaume de
Villaret que les intérêts de son ordre retenaient à Aix,
à cette époque, à la cour du roi de Naples. Ces Saintes
reliques existaient encore au moment de le révolution, et l'on peut en
voir un inventaire détaillé dans de Haitze.1
Charles II avait confié aux religieuses de Notre-Dame de Nazareth, dès
les premiers jours de leur fondation, l'éducation de la princesse Béatrix,
l'une de ses filles, qu'il destinait à l'état monastique ; mais
cette princesse ne répondit pas à son attente, et le 23 janvier
1303, elle déclara formellement à l'évêque de Marseille,
à celui de Fréjus, qui fut depuis le pape Jean XXII, et au grand-sénéchal
de Provence, Richard de Gambateza, qu'elle n'entendait point prendre le voile
et se faire religieuse. Cette déclaration fut faite en présence
d'un grand nombre de témoins, parmi lesquels on remarque l'archevêque
d'Aix, le viguier et le juge-royal de cette ville, plusieurs jurisconsultes
et quatre professeurs de droit civil. 2
La princesse Béatrix épousa, en effet, en 1305, Azzon IV, marquis
d'Est, duquel étant devenue veuve, elle se remaria, en 1308, à
Bertrand de Baux, comte d'Andria, grand amiral du royaume de Naples.
Enfin, le roi Charles II étant mort à Naples, le 5 mai 1309, à
l'âge de 63 ans, dont il en avait passé 24 sur le trône,
son corps fut apporté à Aix, ainsi qu'il l'avait ordonné
par son testament, pour être enseveli dans cette église de Sainte-Marie
de Nazareth qu'il avait fondée.
Nous avons dit plus haut comment les religieuses dominicaines furent transférées,
en 1377, dans le faubourg de Naurabet.
La rue de Nazareth est appelée communément par bien des gens la
rue Saint-Jacques, à cause d'une hôtellerie très renommée,
à l'enseigne de ce saint, qui se trouvait sur la ligne orientale de cette
rue, en face de celle de Courteissade. Celte auberge, qu'on a démolie
en partie depuis une dixaine d'année datait de près de cinq siècles
et était encore, il n'y a guère plus de soixante ans, la plus
fréquentée de la ville. 3
Les Dignoscyo, d'une ancienne famille d'Aix, qui a quitté cette ville
sous la restauration, avaient été maîtres d'hôtel
au logis de Saint-Jacques dans le courant du XVIIe siècle, à la
suite apparamment de quelque revers de fortune ; car ils descendaient d'un Agricol
de Dignoscyo, originaire d'Avignon, qui était venu à Aix pour
y exercer l'office de procureur-général fiscal à la cour
des maîtres-rationaux, sous le roi René, en 1473.
Avant eux le même logis de Saint-Jacques avait appartenu aux Aygosi, puis
aux Boniface, seigneurs de Mazargues, enfin aux Ornano, le dernier desquels
fut Henri-François, seigneur de Mazargues, fils et frère des deux
maréchaux de France Alphonse et Jean-Baptiste d'Ornano.
1 Curiosités les plus remarquables
de la ville d'Aix, pag. 110 et suiv. Retour
2 Cette charte est très curieuse. Elle est imprimée dans l'Histoire de Provence, par le P. Papon, tom. III, aux preuves, n° 31. - Prefata vero domina Beatrix, y est-il dit, premissis diligenter auditis, ipsa a parte respondit, quod nolebat redire ad monasterium ante dictum, quod non decebat ut asseruit regis filiam monachari ; et licet vita illa religiosa bona existeret secularis tamen sibi amplius complacebat, etc. Retour
3 Un peu au-dessous de cette hôtellerie, en allant vers le Cours, est un impasse ou cul-de-sac que nos pères nommaient lou filadoux, parce qu'ils allaient, comme dit Scarron, y pousser leur selle sans façon et tout à leur aise. Retour